Escapade d'une prêtresse (3)
Les
deux jeunes femmes avaient cheminé presque en silence. L'étroitesse des
passages les obligeant le plus souvent à marcher l'une derrière
l'autre, l'obscurité, l'humidité, les rochers, la végétation et une
volonté de discrétion tant qu'il n'y aurait pas une distance
raisonnable entre elles et le monastère n'incitaient guère à la
discussion.
Pendant tout le temps qu'il leur fallut pour sortir
de Saângraliath, Adraylia suivit machinalement la prêtresse qui la
guidait, déjouant les pièges de cette nature sauvage qui les entourait
et dont le seul but semblait être de les distraire par sa grande beauté
afin qu'elles se rompent le cou...
- Nous voilà sorties des Terres Monacales !
Devant
elles une des nombreuses routes qui sillonnaient l'Empire, empruntées
chaque jour par des armées et des caravanes de marchands, déserte à
cette heure. La guerrière acquiesça d'un mouvement de la tête, gardant
le silence, l'esprit empli de questions sans réponses qu'il n'était pas
encore temps de poser... peut-être les prochains jours lui en
apprendraient-ils plus sur cette mystérieuse petite soeur de la lune,
comme elle l'appelait dans leur correspondance.
Apparament, Nolofinwë attendait qu'elle prenne la suite du voyage en main. Un léger doute - savait-elle monter ? - vite dissipé. Evidemment oui puisque le jour de leur première rencontre elle était arrivée au village du Soleil à cheval... ce qui amenait une nouvelle question : pourquoi aujourd'hui devait-elle s'enfuir, alors qu'elle avait semblé bénéficier à l'époque d'une liberté de mouvements totale ?
- nous verrons... murmura-t-elle dans un souffle.
"Les
choses ne sont pas toujours ce qu'elles semblent être" lui avait
souvent répété Amalric le maître d'armes... phrase souvent suggérée
aussi par le sage Arlong...
Ecartant toutes ces pensées d'un
léger haussement d'épaules, elle se tourna vers la silhouette qui se
tenait à ses côtés, éclairée par cette lune vers qui elle semblait se
tourner pour la protéger et lui parla à voix basse :
-
Afin de nous éloigner rapidement et de semer nos éventuels
poursuivants, je vais appeler Kaodia, ma licorne. Elle peut sans souci
nous porter toutes les deux, nous arriverons à la crique avant le matin.
C'est
ainsi que les premiers rayons du soleil illuminèrent deux jeunes
femmes, enveloppées et encapuchonnées l'une dans une longue cape
gris-bleu, l'autre dans une robe de bure traditionnelle, se défaisant
de leurs chaussures sous le regard bienveillant d'une licorne blanche
afin d'aller se tremper les orteils dans l'eau froide d'une plage
minuscule, désertée de toute présence humaine...