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Adraylia
2 octobre 2006

Sombres desseins (39)

Par Lälwina

Telle une caresse froide, tel ce vent glacé que la mer parfois venait faire souffler dans sa nuque, un nuage, une ombre, passa un instant dans l’esprit de la jeune Lälwina. Alors qu’à l’instant d’avant elle s’amusait, insouciante tel cet enfant qu’après tout elle était, riant aux éclats des joies de la fête, elle avait, soudain, pris un air grave, soucieux. Elle ne remarqua pas les sombres nuages au loin, ni même l’absence de Niabea pourtant censé être au cœur des festivités, seuls ses sourcils, par cet obscur pressentiment, se plissèrent un instant.


- Qu’y a-t-il Lälw ?


Elle sursauta, comme prise en faute, et, l’œil quelque peu hagard, se tourna vers son interlocutrice et amie, Terny, une jeune fille du village du même âge qu’elle. Ouvrant la bouche pour s’expliquer elle s’arrêta à temps, convaincue de la bêtise des propos qu’elle allait tenir. En face sa camarade de jeu la regardait, une lueur d’inquiétude dans le regard, une lueur nouvelle que les deux enfants avaient acquises il y a peu, en affrontant de terribles et mystérieuses créatures aux abords du port. Mais, après tout, peut-être Terny pourrait-elle comprendre ? Elle se reprit.


- Et bien…


Une ombre passa dans le ciel au dessus des deux enfants, les faisant sursauter et stoppant Lälwina dans son explication. Elle fit de grands signes de la main et montra du doigt l’éphémère apparition à son amie.


- L’as-tu vu ? C’était Ad’ ! Mon ange gardien depuis hier !


Terny haussa les épaules, non elle n’avait rien vu si ce n’est l’ombre d’un gros oiseau. Lälwina soupira, il était évident que son amie tentait de chasser de son esprit les récents événements. Sans doute trop affreux… Mais pourquoi ne le faisait-elle pas, elle ? Etait-il si étrange, si différente pour ne pas éprouver cet irrésistible besoin ? Cela la rendait triste et satisfaite à la fois. Elle était fière de son courage certes, même si celui-ci lui provoquait bien des soucis… et que Niabea l’appelait inconscience. Il avait beau parler elle ne faisait rien de dangereux… enfin de très dangereux surtout par rapport à lui ! Elle tira la langue au destin et, accessoirement à Terny et avec un rire fragile partit en courant dans la foule suivie par son amie, bousculant au passage quelques personnes.


- Pardon ! Pardon !


Mais s’il est écrit dans le destin des enfants qu’à ce jeu ils finissent toujours par rentrer dans quelqu’un, il était écrit que Lälwina, elle, devait rentrer une fois de plus dans son tuteur et père adoptif, Niabea. Ce dernier, malgré quelques aptitudes au combat, n’avait pas la carrure d’un spadassin, aussi le choc le fit trébucher puis tomber sur le dos, Lälwina sur lui. Elle lui tira la langue en une moue moqueuse.


- Faut te reposer Niab’ ! Tu tiens plus sur tes jambes !


Et elle eut un rire cristallin tandis que le jeune homme, en une juste punition, la faisait tournoyer dans les airs. Il la reposa à terre avec un sourire et, après un clin d’œil, s’éloigna. C’est alors que, semblant revenir de l’orée des bois, elle vit la Dame d’Eronnor, euh… Merwbrylla ? Avec un sourire elle s’avança vers elle, tout le monde ici ne parlait que d’elle et, de par sa curiosité naturelle, la jeune fille tenait évidemment à rencontrer la nouvelle célébrité locale.


- Dame Merwbrylla ? Je suis Lälwina Kjeldos et je…


Elle fut coupée dans ses paroles par une claque magistrale de l’azkenote qui l’envoya à terre. La joue cuisante, humiliée, Lälwina eut un sanglot tandis que Mewbrylla la regardait, méprisante.


- Reste à ta place jeune Kjeldos. Nous n’avons rien en commun toi et moi…


Puis, la jeune fille la vit s’éloigner, hautaine, et elle serra les poings, rageuse. Jamais encore on ne l’avait traitée ainsi, jamais… Des larmes plein les yeux elle partit en courant avant de s'arrêter net, stupéfaite. Cette sensation froide qu'elle avait ressentie plus tôt... ce n'était pas la première fois que...


- ... Le port... Je l'avais déjà ressenti sur le port avant que...


Ses yeux s'écarquillèrent tandis que la peur faisait son retour en elle. Elle tomba à genoux.


- Qu'est ce qui est en train de se passer ?

Et ses yeux trahissaient à cet instant la plus grande détresse du monde. La plus grande incertitude aussi. Un bien trop lourd poids pour une aussi jeune fille.

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