Sombres desseins (64)
par Galeat
Toujours affaibli par sa crise d'arthrite encore récente, Galeat
peinait à quitter la quiétude des appartements que Niabea lui avait
aloué, ainsi qu'à sa suite, pour se mêler aux autres invités. Lui qui
avait passé sa vie à guerroyer le cul sur une selle et l'épée à la main
s'abandonnait désormais à la douce torpeur du sommeil.
Le calme ... Y a t'il quoique ce soit de plus précieux ? Pensait
le vieux chevalier, qui n'attendait que la majorité de son neveu Aymar
pour se retirer dans le monastère de Contemplation en Azkenor. Levant
les yeux au ciel, il rendit grâce à Mystra de lui avoir permis de
parvenir à la sereinité, lorsque le bruit d'un projectile éclata non
loin de lui.
Une catapulte ! Sa longue expérience de la
guerre ne lui laissait aucun doute, Kjeldos était attaqué. Et dans
l'état actuelle des défenses de la ville, c'était une véritable
catastrophe si les forces ennemis étaient nombreuses, d'autant plus que
la kronainbourg de Khazaad avait fait des ravages dans l'armée
cadrienienne.
Galeat songea aussitôt à rejoindre son ami pour lui prêter main forte dans l'organisation de la défense de la ville.
-Une épée ! Cria t'il à l'adresse d'un des hommes de sa suite, qui ne tarda pas à revenir avec un court glaive qu'il tendit à son suzerain.
-Mais c'est un truc de tafio...commença
à dire Galeat en apercevant la petitesse relative de l'arme par rapport
à celles qu'il maniait autrefois. Mais il s'interrompit en soulevant la
dite épée, dont le poid n'était pas du tout négligeable pour l'homme
qu'il était devenu.
-Monseigneur, s'écria alors affolé le triste sire qui lui servait de médecin. Votre foie !
-Tu serais pas en train de te foutre de moi toi ? Je croyais que c'était du poumon que j'étais malade.
Et le savant homme confondu de se perdre en bafouillements érudits que Galeat n'écouta même pas ... occupé qu'il était à donner des instructions aux quelques hommes d'armes qui l'avaient accompagné.
La
petite troupe ne tarda pas à quitter le palais, en pleine
effervescence, non sans se renseigner brièvement auprès d'un serviteur
sur la direction prise par Niabea et par ses hommes ... et ce pour la
suivre aussitôt. Celle ci semblait parsemée d'embûches, ou du moins de
créatures peu recommandables et de forbans. Fort heureusement, l'on
semblait privilégier les cibles faciles et les laemyriens ne
paraîssaient pas l'être.
Comme un signe manifeste du mal qui s'étendait en ces lieux, le jour se faisait de plus en plus sombre, étrangement.
Sur le sol, des corps épars, de civiles et de soldats cadrieniens pour la plupart ... autour, des ruines. Une chose est sûre, pensa Galeat tristement, s'en était fini de la Kjeldos qu'il avait connu. Apparemment,
l'armée ennemi avait percé les défenses de la ville et l'on ne leur
résistait probablement plus de façon organisée. Enfin, Niabea en
saurait certainement plus lorsqu'ils le trouveraient ... s'il n'était
pas lui même tombé.
Cette pensée attera le vieux chevalier. Il
s'était fais à l'idée que son existence toucherait bientôt à son terme,
mais que son compagnon de toujours passe de vie à trépas... ça non ! Il
n'étais prêt à l'accepter. Il fit signe à ses hommes de presser
davantage le pas. Il faisait désormais tout à fait nuit.