Nouvelle vie (10)

Par Lälwina

Cela faisait une semaine déjà que Lälwina s’occupait d’Ärsin, Niabea était depuis parti pour le Nord, seul comme la jeune fille s’en doutait, la laissant seule en Cadrienia pour quelques jours. Effectivement la présence de son père adoptif – elle s’était peu à peu faîte à cette idée – lui manquait. Elle s’était surprise à guetter son retour du haut des remparts. Le reste du temps elle s’occupait d’Ärsin, à qui elle consacrait une attention folle, et ce au grand désespoir de Terni. Aussi cette dernière avait-elle décidé d’aider Lälwina dans ses tâches journalières, chaque jour, c’était là le seul véritable moyen qu’elle avait trouvé pour passer du temps en sa compagnie…

Aujourd’hui, alors que la rosée rendait encore les champs humides, les deux amies étaient assises dans un pré clos, tandis qu’ Ärsin galopait, profitant des grands espaces pour se développer. Elles discutaient de choses et d’autres, plaisantant d’un rien. S’émerveillant des progrès du jeune poulain. Tout semblait être dans le meilleur des mondes possibles…

Mais Terni restait amère, secrètement, de l’affection qu’elle jugeait déclinante de Lälwina, aussi, son âme d’enfant, inconsciemment, cherchait un moyen de se venger de ce manque affectif. L’absence du Tisseur venait à point nommé dans cet optique. Aussi, l’air de rien et les yeux perdus dans les fleurs, la jeune fille engagea t’elle la conversation sur ce sujet qu’elle savait être sensible. Qui sait ? Peut-être cela la rapprocherait-elle de Lälwina ?

- Et le Seigneur… T’a-t-il dit, finalement, où il partait ?

Elle s’attendait à ce que Lälwina s’énerve et fustige son tuteur, mais, à sa grande surprise, il n’en fut rien et un grand sourire, éclatant, éclaira le visage de l’ancienne orpheline. Ce sujet ne la touchait plus guère désormais, elle savait ne rien avoir à craindre de ses excursions du Tisseur. Après tout, ne la considérait-il pas comme sa fille ?

- Non ! Mais il m’a assuré que bientôt je saurais tout ! Alors… j’attends !

Et, alors qu’il semblait que Terni allait répondre, la jeune Lälwina se leva d’un bond et fit signe à son amie de se taire. Un brouhaha léger provenant du château, un changement diffus du fond sonore. Elle se retourna subitement vers Terni.

- Ramène Ärsin à l’écurie s’il te plaît !

Et elle se mit à courir vers le domaine seigneurial, traversant le village du plus vite que ses petite jambes le lui permettaient. En sueur elle arriva dans la cour du château, et, à la présence de nombreux soldats, elle comprit que son intuition était juste : Niabea était – enfin – de retour…

- Niabea… mon … père... Mon père !

Elle courut à sa rencontre, tandis que le soleil frappait la cité, elle était si heureuse de le revoir, si pressée de lui montrer les progrès d’ Ärsin… Soudain, alors qu’elle arrivait à hauteur de la porte son cœur fit un bond et sembla s’arrêter quelques instants tandis que la silhouette de Niabea se détachait à l’horizon. Le Seigneur de Cadrienia n’était pas seul.