voyage en enfer (3)
par Bauglir
Une obscurité insondable noyait Bauglir. Pourtant il sentait qu’il
était en mouvement comme s’il s’enfonçait dans de l’eau. Curieusement
il retenait sa respiration mais cela s’avérait inutile. Après quelques
minutes interminables ses pieds touchèrent enfin un sol dur et
palpable.
Une légère lumière rougeoyante se reflétait sur les
parois de la caverne où il se trouvait. Il talonna Démonia qui
s’engageait déjà sur le chemin sans attendre son compagnon. Ils
descendirent un petit escalier et un malheureux spectacle s’offrit aux
yeux du seigneur. Ils étaient parvenus sur une sorte de corniche
surplombant une immense grotte. Des puits de lave rendaient
l’atmosphère pesante et la chaleur était intenable. De longues files
d’esclaves, où du moins de gens ressemblants à des esclaves par leurs
haillons et les chaînes qu’ils portaient aux poignets et aux chevilles,
s’avançaient lentement pieds nus sur un sol de cendre incandescentes,
poussant des chariots de fer emplis de pierres.
Bauglir été
révolté à cette vue. Il avait envie de tous les libérés. Parmi la foule
se trouvaient des enfants. Des diablotins au ricanement strident
virevoltaient entre les prisonniers, leur enfonçant des tridents dans
leur chair juste par cruauté. Des sortes d’hommes lézards les
fouettaient également.
Le seigneur du Sommerlund fit un pas vers eux mais la main ferme de la démone le retint.
Tu ne peux les aider Bauglir. Ils ont fait un pacte avec le diable… Ils savaient ce qui leur arriverait. Ils sont condamnés à subir des souffrances pour l’éternité…
Et ces enfants ! Ils n’ont pas pactisé avec le diable. Protesta Bauglir.
Peut être mais certains ont condamnés toute leur famille dans leur folie. Ne restons pas ici.
Bauglir
était hors de lui. Cette vue lui donnait la nausée. Quels êtres étaient
capables de tant de cruauté ? Ceci lui donna encore plus envie de mener
sa quête à bien et de débarrasser les abysses de ces être néfastes.
Le
couple se remit en marche et suivit la corniche pendant des heures.
Plusieurs fois ils furent témoins de spectacles semblables et le
seigneur du Sommerlund tentait de détourner son regard et de ne pas y
porter attention. Bauglir avait de plus en plus envie de retirer sa
tunique et sa cape pour respirer un peu. Enfin ils parvinrent à un
passage où l’air frais était bienfaisant.
Le succube annonça
qu’ils arrivaient à destination. Un majestueux escalier en pierre noire
et éclairé par des brasiers s’étendait sur plusieurs centaines de mètre
de long. Curieusement, il n’y avait pas foule et donc plus aucun bruit,
cris de douleur, lanières de cuir fouettant l’air… L’air n’était pas
vicié. Aucune odeur de chair brûlée ou de sueur. Il faisait presque bon
d’être ici. Pourtant Bauglir avait toujours une boule au creux du
ventre.
Alors qu’ils commençaient l’ascension des marches, le
jeune homme cru entendre du bruit derrière eux. Il fit volte face et
vit une ombre se cacher dans un recoin. Quelque chose ou quelqu’un
semblait les suivre. Refusant de se poser des questions et de se
tracasser l’esprit, Bauglir se remit en marche.
En haut de
l’escalier, une grande porte en fer forgé fermait l’accès au palais de
la divinité. A cet instant il était impossible de faire demi-tour. Deux
effrits trois fois plus grand que le seigneur gardaient la porte. Dès
qu’ils virent Démonia, ils ouvrirent les lourds battants et crurent bon
de les escorter, laissant la porte grande ouverte. Les deux démons du
feu jugeaient Bauglir de leurs petits yeux orange et cruels. Ils
étaient curieux de savoir ce que cet humain faisait en enfer alors
qu’il n’était pas enchaîné comme tous les autres.
Le couloir
faisait plusieurs dizaines de mètres de hauteur et des centaines de
longueur. Décidément tout était énorme ici. Et pour confirmer les
pensées de Bauglir, ils se retrouvèrent nez à nez avec un cerbère aussi
haut que trois maisons. L’animal à trois têtes dormait paisiblement…
Des os de corps humain jonchaient le sol.
La bête gardait la
porte de la salle où trônait le diable en personne. Les Effrit
poussèrent les portes lentement dévoilant l’intérieur de la pièce…