voyage en enfer (9)

Par Niabea

Niabea avait senti un grand froid l’envahir, il sentait poindre en lui le désespoir le plus profond. Lorsque Adraylia usa de ses pouvoirs pour redonner à son frère son apparence d’antan il sentit son cœur se déchirer. Il se maudit de ne pas avoir compris plus tôt, pourtant il avait été prévenu par ses visions il y a un an de cela, mais il avait interprété, comme à son habitude, se laissant détourner de l’évidence. La douleur faillit lui arracher un gémissement mais il se contint, tentant de rester impassible devant la démonstration que réalisait la jeune femme. Lorsqu’elle s’effondra en larmes, son ouvrage achevé il ne ressentit rien, sinon cette amertume profonde qui le détruisait depuis quelques minutes déjà. Un démon… Voila tout ce qu’elle était… Indifférent à ce qui l’entourait il se concentrait sur son malheur. Oui, un démon, lui, un Tisseur, avait confié son cœur à… à un démon…

- Protège mon frère… Arlong prendra soin de moi… je t'aime.

Il sursauta. Je t’aime ? Un démon était-il seulement capable d’aimer. Il jeta un regard vide sur le corps étendu à ses pieds. Et lui ? Un démon lui aussi ? Elle était partie sans même qu’il s’en rende compte, toute son énergie absorbée par son désespoir. Il s’effondra à genoux la tête entre les mains, sentant son esprit basculer lentement dans la folie. Une présence sur sa gauche le fit relever la tête. Un démon, encore un le regardait, avec dans les yeux cette lueur qu’il avait appris à détester. La haine bouillonna en lui, il se redressa l’épée à la main, ses cheveux défaits cachant son regard.

- Un Tisseur…

Siffla le démon, et d’autres apparurent à ses côtés innombrables. Le jeune homme ne cilla pas, peu lui importait le nombre, ils ne seraient jamais assez nombreux pour étouffer la colère qui éclatait en lui. L’une des créatures démoniaques s’approcha de lui et montra Bauglir du doigt.

- … Laisse nous emporter l’humain Tisseur… Tu ne fais pas le poids et nous ne voulons pas ta mort.. ce soir…

D’un geste de la main Niabea écarta ses cheveux, révélant aux démons un regard terrifiant, chargé de haine, de colère et de fureur. Du tombeau continuait à se déverser d’autres créatures, il ne leur prêta pas attention, et, lentement, attacha ses cheveux. A ses pieds gisait toujours Bauglir, inconscient. Humain avait dit la créature, il n’était donc pas, pour sa part, un démon. Encore une victime de ces atrocités. Il sortit son épée, faisant reculer instinctivement le premier rang de ses adversaires. Sur le fourreau il vit le ruban aux couleurs d’Adwyr que lui avait offert Adraylia autrefois : sa peine éclata et des larmes coulèrent le long de ses joues.

- Vous commettez une erreur… Ce n’est pas le Tisseur que vous devrez affronter en ces lieux…

Il dirigea sa lame vers le démon qui avait pris plus tôt la parole en un signe de défi. Ce dernier eut un ricanement.

-C’est la petite Dame qui te mets dans cet état pauvre type ?

A cet instant, lorsque le démon prononça ces quelques mots tous les sentiments forts que ressentaient le jeune homme se focalisèrent sur le démon. Se jetant en avant il hurla.

- Enfoirés de quelle couleur est votre sang ?!

Il transperça le démon, surpris de la rapidité et de la violence de l’attaque. Aussitôt la bataille s’engagea et une des créatures proches se jetèrent aussitôt sur lui. Concentrant sa colère il usa de la magie pour les jeter à terre et les inonda de lumière, se délectant de leurs souffrances. Puis il recula, commença à se battre autour du corps endormi de Bauglir. Un bref instant le jeune homme et ses adversaires se regardèrent. Doucement Niabea se baissa et ramassa l’épée du Seigneur de Sommerlund. Il se concentra, imaginant d’où viendrait le prochain assaut.

Puis tout se précipita et le jeune homme se lança dans un ballet mortel, usant de la magie et de ses deux armes en une alchimie mortelle, balayant les unes après les autres les vagues qui sans relâche tentaient de lui retirer le corps du Seigneur endormi. Il les abattait, avec une froide détermination, sans faillir. Puis le calme revint tandis que s’avançaient des démons supérieurs. Ecrasant leurs subordonnées ils s’avancèrent vers le jeune homme. Celui-ci ne pu s’empêcher une bravade.

- Et vous avez pas trouvé d'encore plus pathétiques adversaires ?

Les démons rugirent et chargèrent aussitôt, répandant une odeur de souffre dans le cimetière. Evitant le premier d’une esquive magistrale il lui planta l’épée dans le dos et lança la lame de Bauglir dans la tête du second. Les deux créatures s’effondrèrent avec un bruit sourd et il récupéra son épée, sans se presser, les autres étaient restées interdites devant la perte aussi rapide de leurs compagnons. D’un geste de la main il les invita à avancer.

… Sont encore au moins vingt …

Mais, contrairement à ce dont aurait pu s’attendre le jeune homme ils n’attaquèrent pas tous en même temps. L’un d’entre eux s’avança et avec un sourire atroce déposa les armes à terre.

- Vois humain, nous ne voulons pas nous bat…

Un rayon de lumière le jeta au sol avant qu’il puisse finir sa phrase, venant tout droit de l’épée de Niabea. Devant les regards médusés des autres démons il se délecta de la souffrance de la créature. Puis, alors qu’il ne restait d’elle plus qu’un tas de chaires torturées, il ne l’acheva pas, prenant un plaisir sadique à voir ce qui restait du démon se tordre de douleur par terre. Puis, jetant un regard haineux il s’adressa à la multitude de démons mineurs toujours présente et aux démons majeurs restants.

- D’autres veulent prendre la parole ? Mais sachez que je vous exterminerais jusqu’au dernier sachez-le…

Ce fut la provocation de trop et tous se jetèrent à l’assaut, du plus petit démon à la créature la plus imposante. Et, instinctivement, Niabea comprit qu’il ne pourrait protéger Bauglir devant la furia qui se déchaînait contre lui. Repoussant un instant ses adversaires il jeta un sort de guérison majeure au Seigneur de Sommerlund et jeta près de lui son épée. Puis il jeta un dernier sort d’interdiction à l’entrée du tombeau, rendant de fait l’entrée impossible aux démons. La rage de ces derniers atteignit alors son paroxysme lorsqu’ils comprirent qu’ils ne pourrait récupérer le Seigneur de Sommerlund.

… Je ne le fais pas pour elle… Non… Pas pour elle… Pour moi…

Il essayait de s’en convaincre tandis que la fatigue commençait à engourdir ses membres et que ses doutes revenaient le hanter en même temps que la lassitude. Pour la première fois un coup l’atteignit et le projeta contre un mausolée proche. Il sentit le sang envahir sa bouche et cracha un caillot de sang au sol, aussitôt il du éviter un coup supplémentaire qui brisa la roche derrière lui, il grimaça et trancha la créature lui faisant face.

- Belle mort néanmoins… Dommage que Galeat n’assiste pas à ça…

Et, réunissant ses dernières forces il se rejeta dans la bataille, faisant payer par leurs sangs chaque pas qu’il faisait en arrière aux forces démoniaque.